Conférences 2020-2021 – Thierry Soulard
L’empire germanique est né en 962 avec le couronnement impérial d’Otton 1er. Si il se revendique comme l’héritier de l’Empire carolingien qui avait éclaté en 843 à la suite du Traité de Verdun, il est recentré sur le monde germanique. Après la brillante dynastie ottonienne, il s’affaiblit au XIe siècle face au pouvoir émergeant du pape et l’humiliation d’Henri IV à Canossa (1077). A La suite de la dynastie franconienne, les Hohenstaufen restaurent le prestige impérial, non sans difficultés. Deux personnalités fascinantes, Frédéric Ier Barberousse et Frédéric II, « stupor mundi », sont des figures mythiques de l’histoire allemande.
L’art s’inscrit dans la continuité des réalisations carolingiennes, en particulier l’architecture, véritable manifeste politique, alors que les arts précieux sont marqués par un apport byzantin. A partir du XIIe siècle il intègre peu à peu de nouveaux apports romans puis gothiques. Le célèbre et mystérieux château de Frédéric II à Castel del Monte exprime la culture et l’originalité du grand souverain.
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26 novembre 2020 Les fastes de l’Empire Ottonien
Après la désagrégation de l’empire carolingien, une nouvelle dynastie a refondé un empire germanique au Xe siècle. L’accession au trône royal de la dynastie de Saxe en 936 avec Henri Ier marque la restauration du pouvoir. Son fils, Otton Ier, reprend le titre impérial en 962, devenant le plus puissant souverain d’Occident. Il est à l’origine d’un empire désormais seulement allemand, le « Reich der Deutschen », à la différence de l’Empire de Charlemagne. Durant cette période, l’art ottonien s’inscrit dans la tradition carolingienne dont il revendique l’héritage à un moment où s’élaborent les premières innovations romanes. L’orfèvrerie, les émaux et les ivoires ottoniens développent les liens avec l’art byzantin, la femme d’Otton II et mère d’Otton III, l’impératrice Théophano, appartenant à la famille impériale de Constantinople. Mais le pouvoir de la dynastie s’effondre avec la mort à 22 ans d’Otton III, qui avait rêvé d’un empire universel, puis celle d’Henri II en 1024.
3 décembre 2020 Conflits avec le Pape
Nous connaissons tous l’expression « aller à Canossa ». C’est un épisode emblématique de la lutte qui opposait le pape et l’empereur au XIe siècle. Une nouvelle dynastie franconienne (ou salienne) avait pris le pouvoir avec Conrad II en 1024. Son successeur, Henri III, particulièrement pieux, avait soutenu la réforme de l’Eglise. En 1056, son fils Henri IV accède au pouvoir, au moment où le pape prétend à une autorité totale sur l’Eglise. Grégoire VII, élu pape en 1073, s’oppose frontalement à Henri IV, en particulier dans la « Querelle des investitures » des prélats, laissant son nom à la « Réforme Grégorienne ». La puissance impériale s’érode, l’empereur doit faire pénitence devant le pape à Canossa (1077). L’empire tente cependant de s’inscrire dans la continuité carolingienne, comme l’art en témoigne, en particulier l’architecture. La cathédrale de Spire en constitue un monument emblématique, faisant référence à Aix-La-Chapelle.
10 décembre 2020 Frédéric 1er Barberousse
A la mort du dernier empereur Franconien, Henri V, en 1125, une nouvelle dynastie, Hohenstaufen, prend le pouvoir avec Conrad III. Son neveu Frédéric Ier Barberousse, d’une forte personnalité, accède au trône de Germanie en 1152. Couronné empereur en 1155, il mène une politique très active en Italie du Nord et s’oppose au pape, en relevant l’honneur de l’Empire, cherchant l’équilibre des deux pouvoirs, temporels et spirituels (théorie des deux glaives), tout en aspirant à une domination sur tout le monde chrétien. Il fait d’ailleurs canoniser en 1165 Charlemagne, dont il reprend la conception de la fonction impériale. En épousant Constance, l’héritière des rois normands de Sicile, avec son fils le futur Henri VI, il créée un rassemblement territorial considérable, véritable menace pour le pape. Frédéric Barberousse est devenu un personnage mythique pour l’histoire allemande, archétype du souverain germanique célébré dans les arts.
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17 décembre 2021 Frédéric II, « Stupor Mundi »
Frédéric II est un souverain fascinant, déjà surnommé de son vivant Stupor mundi (la « Stupeur du monde ») et « prodigieux transformateur des choses ». Même sa naissance le 26 décembre 1194 est extraordinaire. Orphelin très jeune, héritier du sud de l’Italie par sa mère Constance, il eut du mal à récupérer la couronne germanique tenue par son père Henri VI puis son oncle Frédéric IV, prise ensuite par Otton IV de Brunswick. Ce dernier fut chassé par Philippe Auguste, allié des Hohenstaufen (Bouvines, 1214). C’est l’origine des Guelfes et Gibelins. D’une remarquable culture, éclectique, attachée à l’Orient, il fait preuve d’une large ouverture d’esprit et entre en conflit violent avec le pape. Mécène, il fait réaliser des imitations de l’Antiquité romaine dont il revendique l’héritage politique et fait bâtir des châteaux dans le sud de l’Italie, dont Castel del Monte, le plus célèbre et le plus énigmatique. Après sa mort en 1250, ses héritiers sont éliminés durant une période de troubles (le Grand Interrègne) qui conduira à l’élection de Rodolphe 1er de Habsbourg en 1273.