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Compte rendu de la visite du château de Monté Cristo
faite le vendredi 21 octobre 2012

Texte de Colette Van de Valle
 

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Domaine préservé à Port-Marly entre Versailles et Saint Germain en Laye, un ensemble de terrains boisés est acquis en 1844 par Alexandre Dumas qui recherche le calme nécessaire à sa production littéraire. Fort de son succès après la parution des trois mousquetaires et du Comte de Monte-Cristo, il commande à l’architecte Hyppolyte Durand un château "renaissance", en face d’un pavillon gothique entouré d’eau au milieu d’un parc anglais. Le château est inauguré en juillet 1847 en présence de 600 personnes. Cette demeure suscite la curiosité de tous : "on venait de Paris la voir, les récits fabuleux ne faisaient pas faute ; les bourgeois désertaient Trianon, Meudon et Saint-Cloud pour venir voir Monte-Cristo".

Notre curiosité est, elle aussi excitée lorsque nous pénétrons dans le parc et qu’au détour d’un chemin, nous découvrons un petit bâtiment baptisé "le château d’If". En effet, Dumas, rapidement envahi par ses amis dans la demeure principale s’isole en cet endroit pour travailler, surtout la nuit car l’inspiration lui est plus favorable à ce moment-là. Cette "forteresse de poupée" rassemble divers styles architecturaux : ogives gothiques, rosaces et rinceaux, balcon ouvragé et colombages. Sur les façades sont gravés 88 titres des œuvres de l’écrivain et sont sculptés certains personnages de ses romans.
 
"Le château d'If"

La demeure principale présente, elle aussi, des façades entièrement sculptées : motifs floraux, anges, instruments de musique, armes, animaux étranges. Au-dessus de chaque fenêtre, au rez de chaussée, Alexandre Dumas a fait placer un portrait d’écrivain dramatique de toutes les époques. Elle semble nous accueillir elle-même, par l’intermédiaire des armes de ses ancêtres et de sa devise personnelle: "j’aime qui m’aime". Peu modeste, l’écrivain a orné les clochetons au sommet des deux tourelles du château de ses initiales entrelacées.
 
Le château de Monté Cristo

A l’intérieur, la vie d’Alexandre Dumas est retracée au fil des pièces traversées, les documents présentés évoquent un homme rare aux multiples facettes, une figure incontournable du XIXème siècle.
Né à Villers-Cotterets, Dumas est le fils du général de division Alexandre Dumas Davy de la Paillèterie et de Marie-Louise Labouret. Il tient son nom de sa grand-mère, Marie Cessette "du mas" l’une des esclaves noires de son grand-père à Saint Domingue.
Engagé à la bibliothèque du Duc d’Orléans en 1823, il lit beaucoup et forge sa culture littéraire. Véritable dandy à l’époque, doté d’une élégante silhouette longiligne, il se passionne pour le théâtre et profite de la vie nocturne parisienne. Très jeune, il séduit et sa vie est jalonnée de liaisons toujours passionnées. Il ne se marie qu’une seule fois avec Ida Ferrier mais leur union ne dure pas. En 1824, Laure Labay lui donne un fils, Alexandre et en 1831, il a une fille, Marie-Alexandrine avec Belle Kreilssamner.
La rencontre d’Alexandre Dumas fils avec Marie Duplessis, une courtisane atteinte de tuberculose lui inspire le roman : "La Dame aux camélias" adapté pour l’opéra et devenu "La Traviata".

La salle à manger exhale encore, avec un peu d’imagination, d’alléchantes odeurs de repas savoureux concoctés par Alexandre Dumas, bon vivant et fin gourmet qui aime organiser des soupers somptueux pour ses amis et ses maîtresses. Au château de Monte-Cristo, les invités se succèdent, l’écrivain tient table ouverte en permanence, ne sachant pas toujours qui il reçoit. En 1869, il réalise son rêve de gastronome en écrivant un dictionnaire de cuisine, les recettes sont étonnantes, telles les pieds farcis d’éléphants ou les filets de kangourous, recettes raffinées ou cuisine familiale, ce livre est le reflet de la cuisine du XIXème siècle.
 
La salle à manger
© chateau-monte-cristo.com

Dumas se met à écrire pour le théâtre, il devient très vite un auteur à succès car il est doté de facultés intellectuelles, d’une puissance de travail étonnantes et d’une imagination foisonnante. Soixante sept pièces, parmi lesquelles "Christine" et "Henri III et sa cour", peuvent être dénombrées : des drames historiques, des drames contemporains, des comédies … qui seront représentés dans son propre théâtre, le Théâtre Historique.
Le romancier est aussi célèbre que l’homme de théâtre, Dumas fait paraître ses romans dans la presse sous forme de feuilletons, il excelle dans l’art de tenir ses lecteurs en haleine, leur apporte du rêve, de l’action, les fait rire et pleurer. Son premier chef d’œuvre "Georges" est publié en 1843 ; suivront "Les Trois Mousquetaires" en 1844, puis "Le Comte de Monte-Cristo" et "La Reine Margot". Ecrivain prolifique à l’imagination débordante, Dumas publie successivement "Vingt ans après", "Le Vicomte de Bragelonne", "La Dame de Montsoreau", "Le Chevalier de Maison Rouge"…..
Parallèlement à sa carrière d’homme de théâtre et de romancier, Dumas est également journaliste. Fondé en 1853, "Le Mousquetaire", quotidien artistique dont Dumas rédige la majeure partie est publié pendant trois ans. Lors de son séjour en Italie, il est nommé directeur de "l’Indipendente", journal destiné à soutenir la politique de Garibaldi. Dumas écrit seul "le Monte-Cristo" de 1857 à 1860. Il devient directeur littéraire du journal "les Nouvelles" qu’il rebaptise "le Mousquetaire" de 1866 à 1867. Il publie de 1868 à 1869 un tri-hebdomadaire, "le d’Artagnan" appelé ensuite "le Théâtre journal".
"Voyager, c’est vivre dans toute la plénitude du mot…" écrit Dumas qui, en insatiable curieux, se mêle au peuple qu’il rencontre, en emprunte les costumes traditionnels, en observe les coutumes, se pénètre de ses habitudes culinaires. La Suisse, puis l’Italie du Nord lui inspirent ses "Impressions de voyage". L’Espagne l’accueille, de là, il gagne la Tunisie. En Russie, pendant dix mois, il est reçu comme un prince, assiste à des réceptions, prend part à une chasse à l’ours en traineau, se rend d’Astrakhan à la mer Caspienne à bord d’un bateau à vapeur.


Le salon mauresque du château de Monte-Cristo évoque le séjour de Dumas en Algérie où le ministre de l’instruction publique de l’époque lui a confié la mission, par ses récits vivants et enthousiastes, d’inciter les français à s’installer dans ce pays. Séduit par le travail des stucateurs dans les salons du Palais de l’Alhambra à Grenade, de l’Alcazar à Séville et dans le palais du Bey de Tunis, Dumas ramène deux sculpteurs avec lui en France pour exécuter la décoration de son salon mauresque. Grâce à la générosité de Hassan II, roi du Maroc, la restauration de cet endroit en 1985 a permis de tout refaire à l’identique : les sculptures géométriques taillées dans le stuc sur les murs, les vitraux, les tissus. Le sol, autrefois en parquet, présente aujourd’hui, une magnifique mosaïque en zelliges et marbre de Fès.
 
Le salon mauresque
© chateau-monte-cristo.com
Alexandre Dumas a su, de son vivant, faire vibrer, captiver et émouvoir des milliers de spectateurs et de lecteurs. Il fascine encore aujourd’hui les uns et les autres mais également les cinéphiles et téléspectateurs. Sa production littéraire a conquis la presse, l’édition, la radio, le théâtre, le cinéma et la télévision, elle est, ainsi, assurée de sa pérennité.
 
Le domaine, quant à lui, a échappé à la démolition en 1969 grâce à l’association des amis d’Alexandre Dumas créée autour d’Alain Decaux et de quelques passionnés d’art et de littérature. Les trois villes de Marly le Roi, du Pecq et de Port-Marly gèrent aujourd’hui le domaine, elles ont contribué à lui rendre vie en permettant aux visiteurs de s’imprégner de l’atmosphère d’une époque et du style de vie de l’écrivain.
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