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Compte rendu de la sortie
à la Vallée aux Loups et au Domaine de Sceaux
faite le mercredi 16 mai 2012

Texte de Colette Van de Valle

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Par un heureux hasard, le soleil nous accompagne dans notre visite de la maison de Chateaubriand, à la Vallée-aux-Loups et du domaine de Sceaux.
   
 La Vallée aux loups  
En publiant dans le " Mercure de France " un article hostile au despotisme napoléonien, Chateaubriand se voit contraint de quitter Paris. Il acquiert alors, en 1807, le domaine de la Vallée-aux-Loups, simple chaumière au milieu d'une clairière en friche, située au hameau d'Aulnay, paroisse de Châtenay. Il vivra là, avec Céleste, sa femme, près de dix ans de bonheur tranquille qu'il consacrera à l'enrichissement du lieu et à son travail d'écrivain.
   
La maison de Chateaubriand
   
La visite de l'intérieur de la maison nous replonge dans le cadre de vie de Chateaubriand et de Juliette Récamier : beau mobilier, souvenirs, gravures, manuscrits…
 
La salle à manger évoque les soirées au cours desquelles les Chateaubriand recevaient leurs amis, en particulier le 4 octobre, jour de la fête de Chateaubriand et de la commémoration de son arrivée à Jérusalem. Chaque invité se devait de porter un nom d'animal, Chateaubriand et sa femme étaient " le chat " et " la chatte ".
 
Dans le vestibule, un magnifique escalier à double branche, peut-être récupéré sur un brick anglais occupe tout l'espace, les hautes baies vitrées permettent de découvrir le parc transformé par Chateaubriand pour évoquer ses voyages à travers le monde. Des arbres imposants y prospèrent, ainsi un catalpa couché par la foudre essaime de nombreuses pousses sur la pelouse, entourées par de somptueux massifs de rhododendrons. Paysagiste mais aussi architecte, Chateaubriand fait ériger sur la façade, un péristyle à l'antique supporté par deux colonnes de marbre gris et deux cariatides.
 
Un beau mobilier Charles X en bois d'érable moucheté marqueté d'amarante occupe le salon Montmorency, les murs sont tendus d'une perse Braquenié identique à celle du XIXème siècle. Les objets d'art, les portraits évoquent l'attachement de Chateaubriand aux Bourbons, la parure de cheminée en opaline bleue a appartenu à la Duchesse de Berry, épouse du second fils de Charles X.
 
La pièce maîtresse du salon bleu est la méridienne sur laquelle Juliette Récamier posa pour le peintre David en 1800, une copie du célèbre tableau est accrochée au-dessus.
 
Dans l'aile Montmorency érigée en 1820, la véranda ou salon des Floridiennes abrite un surprenant " buisson aux oiseaux " qui rappelle le goût des voyages de l'écrivain. Comme le voulait la tradition, les marins en offraient à leur famille, chaque oiseau représentant une année d'absence.
 
Les travaux de restauration de la maison de Chateaubriand ont permis de retrouver des fragments du papier peint aux oiseaux et bambous du vestibule Montmorency qui a ainsi pu être refait à la planche d'impression. Ce décor champêtre de style restauration, présente l'édition originale " d'Atala " illustrée par Gustave Doré en 1863.
 
Le salon jaune évoque la carrière politique de Chateaubriand depuis les Cent-jours jusqu'à la Monarchie de Juillet et quelques figures marquantes de cette époque. Louis XVIII nomme l'écrivain ministre d'état puis pair de France mais un post-scriptum : " vive le Roi quand même ! " ajouté à la fin de son ouvrage " De la monarchie selon la charte " lui vaut d'être privé de la moitié de sa pension. La vente de la Vallée-aux-Loups est inéluctable, l'affiche annonçant cette vente en 1818 est exposée dans cette pièce.
 
Matthieu de Montmorency devient le nouveau propriétaire et ce sont ses meubles que nous admirons aujourd'hui. Seul, un petit bureau dans le cabinet semble avoir appartenu à Chateaubriand, il y aurait commencé les " Mémoires de sa vie ", futures " Mémoires d'outre-tombe ".
 
A l'étage, l'Antichambre est consacrée à " Chateaubriand et la Grèce ", son engagement en faveur de l'indépendance des Grecs était déjà évoqué dans " l'itinéraire de Paris à Jérusalem " en 1811 et dans une note de 1825. Des gravures figurant plusieurs monuments d'Athènes et le voyage de Chateaubriand en Grèce ornent les murs, des objets et écrits disposés dans les vitrines décrivent le mouvement philhellène en France.
 
Une exposition, dans l'ancien Salon de la Nature de Montmorency, est consacrée aux gravures de Constant Bourgeois qui représentent les belles propriétés du début du XIXème siècle à l'époque où le jardin à l'anglaise remplace les aménagements paysagers à la française. Alexandre de Laborde réunit ces estampes dans un ouvrage intitulé " description des nouveaux jardins de la France et de ses anciens châteaux ", La Malmaison, Méréville ou Ermenonville y figurent en bonne place.
 
La maison de Chateaubriand connut plusieurs propriétaires avant d'être acquise par le conseil général des Hauts de Seine. Matthieu de Montmorency agrandit la demeure et y accueille Juliette Récamier de 1818 à 1826, Sosthènes II de la Rochefoucault, riche et mondain, en fait un lieu de plaisir et de mondanités, les docteurs Le Savoureux et Hugonin l'achètent en 1914 pour la transformer en lieu d'étude des maladies de l'esprit. La mémoire de ces personnages est évoquée dans le salon dit " Le Savoureux ".
 
Quelques éditions originales d'œuvres de Chateaubriand sont présentées dans les vitrines de l'antichambre turque ainsi nommée à cause du papier peint panoramique représentant une turquerie sur laquelle sont décrits les périples effectués par Chateaubriand au cours de sa vie.
 
Juliette Récamier occupa une chambre au décor raffiné à la Vallée-aux-Loups, le mobilier Charles X en bois fruitier est mis en valeur par une tapisserie imprimée de coquelicots et de bleuets, le lit surmonté d'une aérienne mousseline blanche rappelle qu'elle n'a porté que des vêtements blancs jusqu'à sa mort.
 
Dans la chambre de Chateaubriand, un élégant décor aux tonalités vertes et jaune safran sert de cadre à un beau mobilier d'acajou ainsi qu'à divers portraits et objets comme ceux exposés sur la cheminée, en particulier, une pendule néo-gothique qui suggère le goût pour le Moyen Age dont Chateaubriand fut l'un des introducteurs en France.
 
Nous quittons ce lieu enchanteur qui invite à la rêverie, un lieu fait de sérénité, de culture et d'histoire, trésor caché dans un écrin de verdure et comme l'écrivait Chateaubriand " un lieu retiré d'où l'on puisse voir s'envoler les années… ".
 

L'auberge de la Roseraie à Fontenay aux Roses nous accueille pour un agréable déjeuner très convivial avant de partir pour le Domaine de Sceaux.

   
 Le Domaine de Sceaux  
Les deux statues de la grille d'honneur
 
Nous pénétrons dans le Parc de Sceaux par l'entrée d'honneur aux accents d'Aïda de Verdi, répétitions de l'opéra en plein air qui aura prochainement lieu dans la cour d'honneur, pour nous diriger vers le musée de l'Ile de France, situé dans le bâtiment édifié en 1856 par le Duc de Trévise.
 
En effet, rien ne subsiste du corps principal de la superbe demeure de Colbert, construite en 1670 par l'architecte Claude Perrault, décorée par Le Brun et les sculpteurs Coysevox et Girardon. Les jardins sont confiés à Le Nôtre, l'eau captée au flanc des coteaux du Plessis-Robinson alimente le canal, les bassins et les fontaines. Le Roi-Soleil inaugure cet endroit magnifique en 1677 lors d'une fête somptueuse, il y reviendra en 1685, accueilli par Seignelay, le fils de Colbert.
 
En 1700, le domaine est vendu au Duc du Maine, fils légitimé de Louis XIV et de Madame de Montespan, le Roi-Soleil s'arrête souvent chez son fils préféré. La duchesse du Maine, petite-fille du Grand Condé, qui va régner sur le domaine pendant 53 ans, y recrée une cour princière, s'entoure de poètes et de littérateurs dont beaucoup sont oubliés aujourd'hui, cependant, le plus célèbre d'entre eux, Voltaire, y fait de nombreux séjours. Fêtes, divertissements, jeux d'esprit se succèdent, entre 1714 et 1715, de grandes fêtes de nuit y sont données. Un théâtre est construit au premier étage du château, les jardins du " petit château " réservé aux deux enfants de la Duchesse sont redessinés, un élégant pavillon très original avec ses pièces rondes est élevé dans les jardins de la ménagerie.
 
Lorsque la Révolution survient, le domaine, propriété du neveu du Duc du Maine, le Duc de Penthièvre, est confisqué puis vendu à un négociant qui fait raser le château et met le parc en culture.
 
En 1856, le duc de Trévise fait élever le château actuel, en brique et en pierre dans le style Louis XIII, le parc est replanté sur les tracés de Le Nôtre. Après une période de faste sous le second empire, la famille de Trévise peine à entretenir le domaine. Celui-ci est acquis en 1923 par le département des Hauts de Seine qui en entreprend la restauration et ouvre le musée de l'Ile de France en 1937 dans le château.

 
Sous la conduite d'un aimable conférencier, nous découvrons les collections de ce musée qui se déclinent suivant quatre thèmes différents : le domaine de Sceaux et ses propriétaires, les céramiques des environs de Paris, les résidences royales et princières, les paysages d'Ile de France du XVIIIème siècle au XXème siècle.
 
Les portraits sont ceux des différents propriétaires de Sceaux de 1670 au XIXème siècle, le tableau le plus remarquable est celui de François de Troy (1645-1730), " le festin de Didon et Enée " qui représente un épisode de l'Enéide de Virgile. Didon, reine de Carthage reçoit le héros troyen Enée, mais, en réalité, le peintre représente le Duc et la Duchesse du Maine entourés de leurs familiers à Sceaux.
 
La faïence de Sceaux est exposée dans le salon ovale, des porcelaines du XVIIIème siècle représentent la céramique de Vincennes, Sèvres, Saint-Cloud et des faïences fines du XIXème siècle, reconnaissables à leurs fonds de couleurs rares et à leurs décors témoignent de l'art de la céramique à Montereau et à Creil.
 
Les peintures et dessins des résidences royales et princières sont un témoignage historique et artistique sur de célèbres domaines ; certains ont disparu comme Saint-Cloud, Neuilly ou Méréville (peint par Hubert Robert), d'autres ont été transformés, tels Vincennes et Versailles.
 
La variété des paysages d'Ile de France a inspiré de nombreux artistes, parmi eux, nous remarquons plus particulièrement Georges Michel (1763-1843), le " Ruysdael français " et Paul Huet (1803-1869) surnommé " le Delacroix des paysages ". Le premier est le précurseur du paysage moderne, il recherche les contrastes de lumière des ciels noirs aux nuages d'orages menaçants. Le second est un actif représentant de l'école de Barbizon, il essaie de traduire les variations atmosphériques des environs de Paris. Peu à peu, il intensifie l'intensité lumineuse de sa palette tout en l'éclaircissant, ouvrant la voie aux impressionnistes.

 
Pavillon de l'Aurore
Détails de le coupole peinte par Le Brun
   
Nous nous dirigeons ensuite vers le Pavillon de l'Aurore, construit au début des années 1670 pour Colbert par l'architecte Claude Perrault pour servir de halte au cours des promenades. L'espace intérieur est agrémenté d'une coupole au riche décor allégorique sur le thème de l'Aurore, peinte par Charles Le Brun en 1672. En rapport avec la situation du pavillon, à l'Est du domaine, le thème iconographique de l'Aurore symbolise le renouveau : le lever du Soleil chasse la nuit et ses cauchemars.
 
La course du Soleil, régulant la succession des jours, des mois et des saisons évoque aussi, grâce à l'allégorie, des personnages contemporains : Colbert, ministre de Louis XIV et le Roi ou l'Aurore annonçant et préparant le chemin du Soleil.
 
Le choix et la répartition des allégories sur la voûte révèlent un peintre érudit. Les couleurs choisies, de même que les attributs de chaque personnage, témoignent d'une connaissance approfondie des textes antiques et contemporains, ainsi que des grands décors italiens.

   
Quelques vues du parc:  
   
Terrasse des Pintades devant le château Les Grandes Cascades
   
Le bassin de l'Octogone Statue près du bassin de l'Octogone
 
Cette journée, entre littérature romantique et évocations de splendeurs passées nous a, encore une fois, permis de retrouver avec grand plaisir les richesses du patrimoine culturel français.
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